Troubles du spectre de l’autisme – le syndrome d’Asperger

Troubles du spectre de l’autisme - le syndrome d’Asperger


Qu’est-ce que le syndrome d’Asperger ?

Ne jamais oublier que chaque individu est unique et a sa propre personnalité.

Décrit pour la première fois en 1943 par le pédiatre viennois Hans Asperger, puis remis en valeur par la psychiatre Lorna Wing en 1981, il a été reconnu officiellement en 1994 par le DSM IV (manuel de diagnostic américain) de l’association psychiatrique américaine. En Suisse, il reste largement méconnu.

Le syndrome d’Asperger est une forme d’autisme sans déficience intellectuelle qui fait partie des Troubles du Spectre de l’autisme (TSA dans le DSM V) à l’extrémité « haute » du continuum autistique. Les personnes présentant le syndrome d’Asperger ont un QI qui peut aller de la norme basse à un très haut QI.

Le syndrome d’Asperger est un trouble neurologique, mais en aucun cas une maladie mentale ou un handicap.

Il est la conséquence d’une anomalie de fonctionnement des centres cérébraux dont la fonction est de rassembler les informations de l’environnement, de les décoder et de réagir de façon adaptée.

Les principaux domaines touchés par le syndrome d’Asperger sont l’interaction et la compréhension sociales ainsi que la communication avec le monde. Le plus grand problème : leurs difficultés d’intégration au sein de la société.

Il ne faut cependant jamais oublier que les aspergers sont très cohérents. Il y a toujours une raison qui sous-tend une réaction ou un comportement, même si de prime abord, elle ne nous apparait pas comme une évidence.

Comment cela se manifeste-t-il ?

« C’est comme si vous arriviez dans un pays étranger où vous ne connaissez ni la langue ni les coutumes et que vous essayez tant bien que mal de vous intégrer. » Théo Peeters

Caractéristiques

  • Altération quant aux interactions sociales
    • sur le plan du contact visuel, de l'expression faciale et du langage non verbal
    • développer des relations amicales avec difficulté ou de manière inappropriée
    • peu de réciprocité émotionnelle
    • peu d'empathie cognitive
  • Champs d'intérêts inhabituels, stéréotypés et restreints
    • routines et rituels
    • comportements et mouvements stéréotypés
    • intérêt envers certaines particularités des objets (couleur, texture)
  • Perturbation du fonctionnement social, professionnel ou d'autres domaines importants
  • Isolement social: un penchant pour l’isolement et les activités solitaires
  • Communication: ne décodent pas le langage non verbal, et les échanges verbaux tiennent davantage du monologue que de la conversation à double sens. Il peut y avoir une présence de néologismes (création de nouveaux mots par l'individu)
  • Mimiques, stéréotypies: elles prennent la forme de tics, de mouvements corporels répétitifs, etc.
  • Imagination et théorie de l’esprit: sur le plan cognitif, le niveau de développement des personnes Asperger permet l'accès au jeu symbolique ; toutefois, elles présentent un déficit en ce qui a trait à la théorie de l’esprit. Selon Trébin (1999). Cette théorie se définit par la capacité d'attribuer un état mental à soi-même et aux autres. Cette capacité de « méta-représentation » s'acquiert habituellement vers l'âge de quatre ans, mais, pour ces personnes, son acquisition demeure tardive. Les représentations symboliques sont surtout idiosyncrasiques, en ce sens qu'elles sont particulières et exclusives à l'individu
  • Réponses sensorielles: hyposensibilité et/ou hypersensibilité des sens. Habituellement, un des sens est plus développé que les autres et il agit à titre de repère pour décoder les stimuli de l'environnement
  • Fonctions motrices : motricité fine et coordination motrice déficitaires pour ce qui est de la gestuelle, de la démarche, des déplacements, des jeux, etc.
  • Émotions: elles sont difficiles à décoder et à gérer, tant chez soi que chez l'autre

 

Leurs forces

  • Un grand respect des règles, quand elles sont claires, bien définies et qu’elles ont du sens pour eux
  • Persévérants, perfectionnistes, fiables
  • Directs, honnêtes, sincères, ne jugent pas les autres
  • Nature enthousiaste et positive en lien avec leur naïveté
  • Sens de la justice et de la loyauté
  • Mémoire importante (notamment visuelle)
  • Très observateurs des détails
  • Peuvent avoir des connaissances encyclopédiques des sujets qui les passionnent
  • Souvent doués dans les matières scientifiques, mais pas seulement
  • Apprennent beaucoup par imitation

 

Ces listes ne sont pas exhaustives.

Bien que les atteintes puissent être plus ou moins sévères selon les personnes, les difficultés de comportement, de communication et d’interactions sociales sont les manifestations communes au syndrome d’Asperger.

 

Diagnostic

Il est important que le diagnostic soit établi par un psychiatre selon les critères internationaux (DSM V), et posé le plus tôt possible afin que les personnes Asperger puissent bénéficier d'une prise en charge adaptée. Le bilan amenant au diagnostic peut être pluridisciplinaire selon les tests demandés par le psychiatre (psychologue, psychomotricien, ergothérapeute, etc.).

Empathie

On entend souvent dire que les aspergers sont dépourvus d’empathie, or ce n’est pas le cas. Il existe en effet deux sortes d’empathie : la cognitive et l’émotionnelle.

L’empathie cognitive est la capacité de reconnaître les émotions que ressent l’autre (théorie de l’esprit) en fonction du ton de sa voix et des expressions de son visage. Les aspergers sont incapables de cette empathie de façon intuitive et naturelle et ils doivent apprendre à déchiffrer tous ces signaux.

Par contre, l’empathie émotionnelle est la capacité à partager les émotions, ce dont les aspergers peuvent être capables, mais souvent de façon maladroite, mal appropriée et avec beaucoup d’intensité.

Spécificité des individus à l’extrémité du spectre

Tiré et résumé de l’article « Invisible à l'extrémité́ du spectre » par Ruth Baker

« Parmi les personnes risquant le plus souvent un mauvais diagnostic ou une absence de diagnostic, on compte les adultes, les femmes et les individus doués.

Pour la personne concernée, la reconnaissance de son autisme peut être la clé pour comprendre ses difficultés, en apparence subtiles, mais intérieurement angoissantes ; cela peut leur permettre de trouver les moyens appropriés afin de réaliser leur potentiel.

Certaines personnes, à leur niveau actuel de fonctionnement, ne semblent pas correspondre aux critères formels du diagnostic du spectre autistique, même si elles peuvent l’avoir fait au cours de leur enfance.

A l’extrémité de fonctionnement supérieur du spectre autistique, l’autisme d’un individu peut être considéré comme invisible, car soit le diagnostic d’autisme est complètement négligé, soit il est dévalorisé, nié, la condition des personnes semblant « douce ». Cependant, et les autistes et les professionnels ont souligné, en se référant à cette extrémité du spectre d’autistes considérés comme légers ou de haut niveau, que les conditions pouvaient être très trompeuses.

Les traits autistiques peuvent être vus, mais le diagnostic écarté pour des raisons d’intensité apparemment légères ou des insuffisances de critères de diagnostic.

Une autre raison de l’actualisation d’un diagnostic d’autisme peut être que les traits autistiques sont accompagnés d’autres caractéristiques que l’on croit, de manière erronée, incompatibles avec l’autisme, comme l’empathie, l’imagination, la théorie de l’esprit ou le sens de l’humour.

Un scénario typique est que leurs signes, plus visibles durant l’enfance ont été négligés à un moment où le syndrome d’Asperger était à peine connu et qu’ils sont maintenant « masqués » par des stratégies compensatoires (comme les conversations superficielles normales et un contact visuel) au moment où, adultes, ils sont présentés aux cliniciens.

Quant à la littérature, elle laisse peu de place à l’expression de la condition des femmes sur le spectre autistique. Cela suggère que les indices se présentent différemment et qu’elles sont peut-être sous diagnostiquées.

Par exemple, leurs intérêts particuliers peuvent différer de ceux qui sont typiques aux hommes Asperger, et peuvent être moins évidents et moins susceptibles être imposés aux autres.

La pleine mesure de leurs difficultés sociales peut ne pas apparaître lors de l’interaction avec leurs pairs féminins : par exemple, elles peuvent parler avec éloquence avec le clinicien, avoir de bonnes relations avec les parents, mais être incapables de bavardages typiques et d’autres processus de relation sociale entre femmes.

Certaines trajectoires de développement (fréquentes chez les femmes appartenant au spectre, mais ne se limitant pas à elles) augmentent la probabilité de voir leur autisme négligé.

Par exemple, tandis que leur conscience d’en quelque sorte violer les codes mystérieux de la vie sociale grandit, les filles Asperger peuvent cesser d’avoir un comportement manifestement si inapproprié, mais deviennent plutôt silencieuses, d’autres peuvent copier des comportements ou de personnages, réalisant ainsi une normalité quasi parfaite, au risque de rester à jamais non diagnostiquées, marginalisées et intérieurement perplexes au sujet de la complexité sociale de la vie. 

Deux conséquences néfastes pour les individus qui se trouvent aux extrémités du spectre autistique. En premier lieu, le refus d’accès aux ressources dont ils ont besoin pour donner un sens à leur vie et en second lieu le fardeau des étiquettes individuelles très lourdes qu’ils portent déjà.

Les autres ne parviennent pas à comprendre que des personnes aussi capables dans certains domaines pourraient être ignorantes des règles de base du savoir-vivre et codes sociaux ; ils présument donc qu’ils sont volontairement difficiles ou que tout simplement ils ne se soucient pas des règles sociales ou ne font pas assez d’efforts. Alors que la réalité est souvent le contraire.

Pour ces individus, chercher des réponses à leurs difficultés peut être la clé de compréhension de soi, de l’estime de soi et de l’auto identité.

Cela donne du sens à de nombreuses situations arrivées dans une vie qui avaient généré de la perplexité, cela permet de faire des plans plus réalistes, de connaitre ses forces et ses faiblesses, dont les traits peuvent être modifiés ou développés. On voit mieux ce qui peut être compensé, ce qui doit être surmonté et accepté.

Conclusion

Il est important de prendre en considération ceux qui peuvent se situer à l’intérieur ou juste à la limite de cette extrémité invisible du spectre autistique :

  • Ceux chez qui l’autisme peut être complètement négligé : non diagnostiqué, mal diagnostiqué ou dont le problème présenté est reconnu, mais par leur condition sous-jacente d’appartenance au spectre autistique
  • Ceux chez qui l’autisme est considéré, mais non vraiment reconnu, car elles ne semblent pas correspondre totalement à certains critères et sont considérées comme ayant de l’imagination, ou savent montrer de l’empathie, de l’humour ou répondre à la théorie de l’esprit
  • Les adultes
  • Les individus doués
  • Les femmes

Ces personnes ont besoin d’une évaluation complète de leur développement (avec une expertise particulière si ce sont des adultes, des personnes douées ou des femmes). Si elles ont effectivement de l’autisme ou une affection connexe, si elles répondent ou non pleinement aux critères diagnostics actuels, elles ont besoin :

  • Que les jugements moraux négatifs soient remplacés par une prise en considération de leur autisme basé sur des explications et des stratégies pour les aider dans leurs différences et difficultés
  • D’un suivi de soutien pour accompagner tout diagnostic
  • De l’occasion de connaître et d’avoir accès à la communauté des autistes
  • Et avant tout de compréhension. »

 

Sources

Atwood Tony, Le syndrome d’Asperger – Guide complet, 3ème édition, de Boeck, 2010.

Baker Ruth, Invisibles à l'extrémité du spectre, 11 novembre 2013, consulté le 13.09.2018 sur : http://etreautisteaujourdhui.over-blog.com/2013/11/invisible-%C3%A0-l-extr%C3%A9mit%C3%A9-du-spectre-par-ruth-baker.html.

Mottron  Laurent, L'autisme : une autre intelligence. Diagnostic, cognition et support des personnes autistes sans déficience intellectuelle, Mardaga, 2004.

Noël-Winderling Myriam, Autisme et syndrome d’Asperger, érès, 2016.

Vermeulen Peter, Comprendre les personnes autistes de haut niveau, Dunod, 2013.

 

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